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HISTOIRE
PHYSIQUE, NATURELLE ET POLITIQUE
DE
MADAGASCAR.
PARIS,
LIBRAIRIE HACHETTE ET C",
ROULEVARD SAINT-GERMAIN, 79.
Madagascar.
Histoire de Lx Géographie P-72 bis
TRIANGULATION EXÉCUTÉE DANS LA PROVINCE DES BETSILEO, | par le Révérend Père ROBLET.
EXÉCUTÉE DANS LA PROVINCE D'IMERINA Échelle — 5780280
TRIANGULATION
par ALFRED GRANDIDIER, membre de l'Institut, et le Révérend Père ROBLET, missionnaire S.J. à Madagascar.
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À. Grandidier del. Imprimerie Nationale.
Madagascar
Histoire de la Géographie, p.216
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À Crandidier del.
Imprimerie Nationale
À
HISTOIRE
PHYSIQUE, NATURELLE ET POLITIQUE
MADAGASCAR
PUBLIÉE
PAR ALFRED GRANDIDIER.
VOLUME I. HISTOIRE DE LA GÉOGRAPHIE
PAR
ALFRED GRANDIDIER.
PARIS.
IMPRIMÉ, PAR AUTORISATION DE M. LE GARDE DES SCEAUX,
À L’IMPRIMERIE NATIONALE.
! GGC XX V. M DGCG LXXXV MAR O 4 1987
Deuxième tirage, revu et augmenté en 1892. RO RARIES
HISTOIRE
LA GÉOGRAPHIE DE MADAGASCAR.
TEMPS ANCIENS.
Les anciens ne connaissaient qu'une trés petite partie de la surface de
la terre; 1ls n'avaient même que des notions vagues et incomplètes sur la
plupart des contrées enfermées dans les limites étroites au delà desquelles
ils n'avaient pas osé s'aventurer. Au temps de Strabon, par conséquent
avant l'ère chrétienne, 1ls ne savaient rien de la côte orientale d'Afrique
au Sud du cap Guardafui (Tr ApOLÉTUOY ÀXPTNDIOY) l: ce n'est qu'au
! Quelques auteurs anciens (Lycophron, Pline, etc.) parlent d'une ile située auprès de la côte orientale d'Afrique, à laquelle ils donnent le nom de Cerné, le même sous le- quel on a coutume de désigner l'ile extrême atteinte par Hannon sur la côte occidentale, et qui, en carlhaginois, signifie fin. Mais il n'est pas possible de savoir à laquelle des diverses îles africaines elle se rapporte, puisque, de l'aveu de Pline, on n'en connaît ni les dimensions , ni la position par rapport au continent; Mercator, les Sanson, le P. Har- douin, Brotier, Delisle, etc., identifient cependant, sans hésiter, la Cerné orientale avec Madagascar. Quant à Saumaise, à Vos- sius, à Gosselin, ils n'admettent qu'une seule île Cerné, celle d'Hannon.
Aucune donnée ne nous permet non plus
aujourd’hui de rechercher si Madagascar est l'île, probablement imaginaire. du reste, que Diodore appelle ile d’lambule, du nom du marchand grec qui en a donné la descrip- on, ou celle de Phébol qu'Aristote place dans l'océan Indien * et que Malte-Brun croit être l'ile Fanbalou ou Kanbalou des Arabes, ile qui, d'après ce géographe, serait Mada- gascar, mais que nous croyons plutôt être l'une des Comores.
Il ne nous parait pas utile de discuter les opinions tout au moins bizarres des géo- graphes qui ont pensé que Taprobane, à laquelle les anciens donnaient, il est vrai, des dimensions très exagérées, comprenait tout à la fois Ceylan et Madagascar, ni de ceux qui croient avoir retrouvé l'Atlantide dans la grande île africaine.
* L'ile Phébol, d’après le trailé Mepi Koogov qu'on altribue à Aristote, est située du côté du golle Arabique
et est aussi grande, sinon plus grande, que Taprobane (Ceylan).
Histoire de la géographie.
1
LMVRIMENRIE NATIONALE.
2 MADAGASCAR.
commencement du n° siècle ap. J.-C. que deux marins grecs, Théophile et Diogène, doublèrent ce cap et alterrirent à un port auquel ils don- nérent le nom de Rhapta (éumüpior, Ta Para Àsydueva); peu après, le pilote Dioscore alla jusqu'à un cap situé encore plus loin, qu'il appela Prasum (IHpdäoov dxpor). Les découvertes de ces navigateurs, consignées par Marin de Tyr dans un ouvrage qui ne nous est pas parvenu, nous ont été transmises après discussion par Ptolémée.
C'est non loin de ce cap Prasum qu'est située File désignée sous le nom de Ménuthias ou Ménouthésias (Mevoubias ou Mevoubecias rnc0s) par le célèbre géographe oree, par Arrien, l'auteur du Périple de la mer Erythrée”, et plus tard, au 1v° siècle, par Marcien d'Héraclée. Cette ile. la seule avec l'archipel voisin des Pyrolées que ces auteurs citent dans celte partie du monde, est-elle celle que nous appelons aujourd'hui Ma- dagascar ”? Est-ce au contraire la Grande Comore*, Mafia, Zanzibar”, Pemba, ou même Mogdicho®? Cette question a été très controversée et n'est pas encore résolue.
En remontant aux sources, nous voyons que Pile Ménuthias, ou plutôt le port que fréquentaient les marins est placé par Ptolémée à 330 milles à l'Est-Nord-Est du cap Prasum, et par conséquent, à cause de l'orienta- lion vers le Sud-Est qu'il donne à cette partie de la côte, à 700 milles
! La mer Erythrée est l'océan Indien. 5 Celle idée est développée par Diogo do
? Servel dans son édition de Ptolémée (1535), ainsi que les annotateurs des édi- tions suivantes. Glareanus dans son De Geo- graphiä (1539), Mercator (1569), Ortelius (1570) [voir pl. VIF, n° 1}, Belleforest (1979), Philippe Apian (1556), Hondius et Bertius (1605) [voir pl. VIF, n° 9], J. Megiser (1609), Thomas Herbert (1626), Bochard (1629), Saumaise (1630), Sanson (1655), Flacourt (1658), le P. Hardouin (1685), Coronelli (1688), Delisle (1722), l'abbé Paris (Hist. de l’Acad. des insc. et belles- lettres, 1730, p. 8h), Le Gentil (1762) et Rochon (1791), étaient de cet avis.
Couto dans son Da Asia (1616).
“ C'était l'opinion de d’Anville (Mém. sur Oplhir, 1764, et Mém. sur la mer Érythrée, 1770, Hist. Acad. inse.), d'fsaac Vossius (Notes sur Pomponius Mela), de Guillain, de Ch. Muller (1855), de J. Codine (Mém. sur la mer des Indes , 1868 ,p. 8), d'A. Mer (1885) et de Spruner et Menke (Atlas historique).
» Cetle idée assez extraordinture à élé émise par Gosselin. Cooley, dans son ou- vrage Ptolemy and the Nile (1854), identifie Ménuthias avec Djombo, qui est situé à l'em- bouchure du Djouba. La distance entre les points extrêmes dépasse 1,500 kilomètres!
HISTOIRE DE LA GÉOGRAPHIE. 3 du cap Rhaptum; Arrien, qui avait des idées plus justes sur la configu- ration de l'Afrique australe, le met seulement à deux jours et deux nuits de navigation, soit à 200 ou 250 milles de ce même cap Rhaptum: Marcien d'Héraclée, qui a pris ses renseionements dans la Géograplne de Ptolémée, dit, sans donner de détails, qu'il est situé non loin du cap Prasum. Îl est donc nécessaire que nous cherchions d'abord à quels pro- montoires de la côte orientale d'Afrique correspondent les caps Rbaptum et Prasum des géographes grecs.
Marin de Tyr mettait le cap Prasum sous le tropique du Capricorne. Ptolémée, bien qu'il n'eût recueilli aucun renseisnement nouveau, place le cap Rhaptum par 8°25" de latitude Sud et 73°50° de longitude Est, et le cap Prasum par 15° de latitude Sud et 80° de longitude Est, e’est- a-dire remonte ce dernier de 8° vers le Nord.
Sur quelles données ces deux géographes ont-ils basé leur opinion par- hculiére? Uniquement sur le nombre de jours que Diogène, Théophile et Dioscore ont mis pour se rendre du cap des Aromates, soit au cap Rhaptum, soit au cap Prasum; car, à celte époque, aucun point de la côte orientale d'Afrique n'avait été déterminé astronomiquement, et ni la boussole n1 le loch n'étaient en usage. D'après Marin de Tyr, le navigateur Diogène, poussé par un vent du Nord, est allé du cap des Aromates au cap Rhaptum en vingt-cinq jours, et Théophile, que favorisait un vent du Sud, a fait la route contraire en vingt jours”. C'est aussi ce que dit Arrien. Les marchands qu'a interrogés Ptolémée, et dont les renseignements ne semblent pas très dignes de confiance”, ont évalué à quinze journées seulement le temps ordinaire de la tra-
! Ptolémée, note du chapitre 1x. — Diogène , que le hasard seul avait poussé vers le Sud, ne connaissait pas cette région, tan- dis que Théophile avait au contraire la pra- tique des voyages sur la côte africaine.
? Ces marchands ont dit en effet que les vents varient sans cesse sous l'équateur, ce qui n'est pas exact le long de la côte orien- tale d'Afrique, el qu'il faut six jours pour
aller de Panes à Opone (Hafoun), ce qui est faux, puisque, d’une part, dans les Tables, ces deux villes ne sont écartées que de 1° en- viron et que, d'autre part, Arrien, dans son Périple, ne met Opone qu'à une pelite dis- tance du cap des Aromates (à Aoo stades du promontoire de Tabes, où les navires qui se trouvaient aux environs de Guardafui se réfugiaient dans les mauvais {emps).
1.
h MADAGASCAR. versée entre ces deux caps. Marcien d'Héraclée n'indique pas les dis- tances!.
Sachant le nombre de jours que les marins mettaient pour aller du cap des Aromates au cap Rhaptum, nombre qui a servi de base aux calculs par lesquels Ptolémée a fixé les positions géographiques des deux caps africains et de Ménuthias, nous pouvons facilement évaluer la dis- tance entre ces deux points d'une manière plus exacte que ne l'a fait le géographe grec. Ptolémée, en effet, ne connaissait bien mi la configuration ni l'orientation de la côte d'Afrique, et il n'avait aucune idée du régime des vents et des courants dans cette région, ni des usages de la navigation locale?. Ces notions nous sont au contraire familières. Nous savons que, du cap Guardafui jusque vers le milieu du canal de Mozambique”, il souffle d'avril en septembre des vents réguliers et forts, venant soit du Sud-Est, soit du Sud-Ouest, et que pendant les autres mois, surtout en décembre et en janvier, e’est la mousson du Nord-Ouest qui règne avec une grande violence; nous savons que les courants, malgré un régime assez complexe, ont presque toujours le long des côtes la même direc- üon que le vent dominant et qu'ils y atteignent une vitesse moyenne de 1 mille 1/2, quelquelois même de 2, de 3 et de { milles par heure*. Il ny a done pas, comme le pensait Ptolémée, à temir compte des change
L_Périple de la mer Extérieure. tence des moussons dans l'océan Indien, et,
? Cest ce que montre la discussion à la- quelle il se livre dans le chapitre 1x de sa Géopraphie, p.28 : « Théophile et Diogène ont bien dit le temps qu'ils ont mis pour ailer du cap des Aromales au cap Rhaptum, mais ils n'ont pas dit le nombre de jours pendant lequel ils ont navigué, et ils ne nous on{ pas renseignés sur les changements de force et de direction du vent durant leur longue traversée; il n’est pas vraisem- blable qu'ils aient eu le même vent pendant une vinptaine de jours.» Cependant les Arabes et les Phéniciens avaient déjà, à cette époque, dès longtemps, reconnu l'exis-
vers le milieu du 1 siècle de notre ère, le Grec Hippale les avait utilisées pour aller directement du cap des Aromates dans l'Inde.
5 Au delà du 20° parallèle, les vents soufllent du Sud ou du Sud-Est pendant presque toute l'année.
5 Voir d'Après de Mannevillette (/n- structions pour la navigation des Indes), Hors- burgh (Instructions nautiques), le Routier des côtes Sud et Est d'Afrique par le capitaine de Horsey et les Anstructions nautiques pour l'océan Indien et le canal de Mozambique publiées ré- cemment par le commandant Banaré.
HISTOIRE DE LA GÉOGRAPHIE. 5
ments de force et de direction du vent, quil croyait à tort fréquents sous l'équateur, dans l'estimation de la durée des voyages maritimes au long de la côte orientale d'Afrique, puisque les dhaous ou boutres ?, poussés presque vent arrière par les moussons, n'ont à craindre aucune déviation de leur route : les boutres d'autrefois, qui, comme ceux d'aujourd'hui auxquels 1ls sont absolument semblables, avaient toutes les qualités re- quises de construction et de voilure pour bien marcher vent arrière ou grand largue, et qui ne naviguaient jamais que dans ces conditions favo- rables, étaient des navires d’une vitesse remarquable, et 1l n'y a aucune exagéralion à admettre que leur marche moyenne était au moins de 5 à 6 mulles par heure pendant le jour et de 3 à 4 milles pendant la nuit”. surtout si l’on pense à l'action puissante des courants, qui, comme nous le répétons avec intention, s'ajoute à celle des moussons toujours répu- hères et fortes pendant une grande partie de la Journée *.
Ces connaissances, absolument nécessaires cependant pour faire l’éva- luation approximative de la distance entre les divers points de la côte orientale d'Afrique avec les seules données dont disposaient les anciens, c'est-à-dire avec le temps que les marins mettaient pour aller de Fun à
1 On nomme dhaous ou boutres des navires d'Afrique avec la mousson du Nord, et ils
d'un modèle et d’un gréement particuliers dont se servent encore de nos jours les Arabes et qui existaient déjà du temps de Strabon.
? Les navigateurs anciens, comme en- core du reste les Arabes de nos jours, n’ont jamais essayé de naviguer au plus près, de serrer le vent; quand la brise ne leur élait pas entièrement propice, c'est-à-dire quand elle ne leur venait pas d’arrière ou tout au moins de côté, ils amenaient la voile et jetaient l'ancre dans une crique sans chercher à louvoyer. La voilure et le ga- baril des boutres ne leur permettent pas en effet de virer vent debout. Aussi autre- fois, comme aujourd'hui, les marins arabes descendaient le long de la côle orientale
altendaient la saute des vents pour revenir dans leur pays, faisant un seul voyage par an. Lorsque par hasard des vents contraires s'opposaient à leur marche régulière, ce qui était rare aux époques auxquelles ils faisaient leurs traversées, ils ne tenaient pas la mer, et ils relächaient dans la première petite anse qui se présentait.
$ Ce passage élait écrit lorsque j'ai lu le chapitre où M. Guillain a étudié cette même question; j'ai vu avec plaisir que nous fai- sions tous deux le même raisonnement, bien que, tout en reconnaissant comme moi aux boutres de la plus médiocre construction et de la plus prudente voilure une vitesse d'au moins 4 1/2 à 5 1/2 milles par heure, il calcule les distances tout autrement.
où MADAGASCAR.
l'autre, manquaient à Ptolémée, et la discussion à laquelle ii s'est livré à ce sujet ne repose pas sur une base sérieuse; les conséquences que les divers commentateurs ont tirées des idées exprimées dans sa Géographie ne peuvent done pas être justes.
D'après ce que nous venons de dire du mode de navigation des anciens et du régime des vents et des courants sur la côte orientale d'Afrique, 1l n'est pas douteux qu'on doit estimer au moins de 400 à 1,000 stades, soit de go à 100 milles marins, le chemin qu'ils parcouraient en un jour et une nuit”. Nous trouverons donc, en prenant comme base de notre évaluation le nombre moyen de Jours de traversée entre le cap des Aromates et Rhaptum, soit vingt journées”, une distance de 2,000 milles environ entre ces deux points, ou, en tenant compte de l'orientation de cette partie de la côte, une différence de latitude de 26 à 28°; le cap des Aromates étant par 12° de latitude Nord, le cap Rhaptum serait par 15° environ de latitude Sud et par conséquent lun des caps voi- sins de Mozambique”, et le cap Prasum, que Ptolémée place à 6° plus au Sud”, et qui ne peut être situé au delà du 19° ou du 20° parallèle,
! Cest le chiffre donné par le marin de la côte; ils étaient obligés de s'en écar-
Théophile. — Au xiv° siècle, [bn Batouta ter, non seulement pour éviter des détours
a mis quinze jours pour aller de Zeïla à inutiles, mais surtout pour profiter de la
Mogdicho; or les vents étant variables le long de ja côte d'Adel et toujours réguliers du cap Guardafui vers le Sud, il faut plus de temps pour se rendre de Zeïla à Guar- dafui que de ce cap à Mogdicho; cette der- nière traversée, qui mesure 11° environ, n'a cerles pas demandé plus de cinq à six Jours.
* Dans ce nombre de journées, les re- lâches ne sont certainement pas complées, car les marins d'autrefois, pour lesquels le temps n'avait pas de valeur, restaient, comme les Arabes modernes, des jours entiers, et souvent des semaines, dans les rades où ils jetaient l'ancre. Du reste, il ne faut pas croire qu'ils suivaient toutes les sinuosités
mousson, car tout près du rivage le vent, qui souflle généralement du large pendant le jour et de terre pendant la nuit, est sou- vent moins favorable et, en tout cas, moins réoulier.
3 En citant les cornes de rhinocéros comme l’un des principaux articles d’expor- tation de Rhapta, Arrien vient à l'appui de notre opinion; ces cornes sont en effet assez rares sur les marchés de Zanzibar et de Kiloa, tandis qu'on en trouve en abondance sur toute la côte de Mozambique et de Que- limane.
ñ Le marin Dioscore estimait la distance entre le cap Rhaptum et le cap Prasum à 5,000 stades, soit environ 8°, ce qui, à
HISTOIRE DE LA GÉOGRAPHIE. 7
limite extrême des vents réguliers du Nord, serait quelqu'une des pointes de terre voisines des bouches du Zambèse ou de Sofala!.
Or, d'après Ptolémée”, lle de Ménuthias, ou plutôt le port auquel se rendaient les marins de l’antiquité est à plus de 5° dans l'Est- Nord-Est du cap Prasum”; Arrien dit quil faut deux Jours de navi- galion pour y aller de Rhapta, et il ajoute qu'il est à peu près à la même distance d'un archipel qu'il appelle les Pyrolées; quant à Mar- cien d'Héraclée, qui reproduit en abrégé ce que Ptolémée avait écrit deux siècles auparavant, il se contente de dire qu'il n'est pas loin du cap Prasum.
Quelle est donc cette ile tout à la fois assez proche du cap Prasum, distante da cap Rhaptum, comme des iles Pyrolées, de deux journées de navigation” et située un peu plus loin de Sérapion (bouche du Rofidji ou Kiloa) que de ces Pyrolées”, si ce n'est Madagascar? et les
cause de l'orientation de Ja côte vers le Sud- Ouest, suppose une différence de latitude de 5°; Marin de Tyr metlait ce dernier cap sur le même parallèle que le cap Gorrientes. Au delà, les vents ne sont plus réguliers.
1 Kiepert (Die Ptolemæische Erdkarte, 1879) place le cap Prasum sur la côte orientale de Madagascar, à l'entrée de la baie d'Antongil; pour qui connait les difficultés et les dangers que présente la navigation dans les parages du cap d'Ambre, cap qu'il est presque impossible de doubler de l'Ouest vers l'Est avec des navires à voiles à cause des courants qui sont violents et toujours contraires, 1l est impossible d'accepter celte identification.
2 Nous n'avons pas à nous occuper de Îa position absolue que Ptolémée attribue aux différentes localités de la côte orientale d'Afrique; il met en effet par 6° le cap des Aromales, dont la latitude réelle est (2°, ce qui vicie tous ses aulres nom-
bres. Du reste, on sait que ce géographe. qui suivait le système d'Hipparque, après avoir admis l'orientation de la cô‘e orientale d'Afrique vers le Sud-Sud-Ouest, l'incline ensuile vers l'Est dès qu'il arrive aux pays moins connus comme le cap Rhaptum. Il place Ménuthias par 85° de longitude Est et 12°30 de latitude Sud.
$ S'il s'agissait d'une des nombreuses pe- lites iles qui se trouvent le long de la côte et qui sont toutes en vue de terre, Pto- lémée ne l'aurait certes pas rapportée à un cap aussi éloigné.
4 La distance entre Mozambique et la côte opposée de Madagascar est d'environ 250 milles, qu'il est facile de franchir en quarante-huit heures; les boutres négriers font même quelquefois cette traversée en moins de temps.
® Aujourd'hui les boutres mettent de cinq à six jours pour aller de Zanzibar aux iles Comores.
8 MADAGASCAR.
Pyrolées!, dont le nom indique la nature volcanique ?, ne sont-elles pas les Comores? Du reste, on ne voit pas ce que pourraient être cette mer semée d'écueils (Bpayeïx Sékaooa) dont parle Plolémée et ce canal (xai ris Aeyouérns dpuyos") qui, d'après Arrien, baigne Ménuthias et où se trouvent les îles Pyrolées, sinon le canal de Mozambique avec ses îlots et ses nombreux bancs; car, Jusqu'au cap Deloado, les écueils ne se trouvent guère que le long même de la côte d'Afrique, à une très petite distance de la terre ferme ?.
Écoutons du reste ce que dit l'auteur du Périple de la mer Érythrée : «Une fois entré dans le canal, on navigue pendant deux jours et deux
1 Ces îles ont été identifiées par Stuch, en 1627, avec celles de Pemba, de Zanzibar et de Mafia, par le D' Vincent avec celles de Mombasa, de Tanga et d'Ouasini, par Guillain et par Ch. Muller avec celles de Koua-you , de Paté et de Lamou. Ces opinions ne me semblent pas soutenables, le petit chenal qui sépare ces diverses îles de la terre ferme n'ayant rien de commun avec le canal plein d’écueils dont parlent les géographes grecs. Si du reste les îles Pyrolées avaient été situées le long de la côte d'Afrique, Ptolémée eûtindiqué les distances d'une autre manière; il eût dit que de Sérapion il fallait six jours pour aller au golfe de Rhapta et, de là, un jour pour aller aux îles, tandis qu'il indique une navigation de six Jours entre Sérapion et Rhapta et de septjours entre Sérapion et les iles, montrant par là que les routes à suivre pour aller de lun de ces points aux deux autres sont différentes. Du reste, Zanzibar, Pemba et Mafia avaient autrefois très peu d'importance; les auteurs arabes du moyen âge n'en [ont pas mention, landis qu'ils parlent des iles Comores et de Madagascar.
? Le texte porte Hupador row, je crois qu'il faut lire Hugoxder (iles aux rochers de leu).
Tel était aussi l'avis d'Ortelius (voir pl. VIF, n° 1). Tout le monde sait, en effet, qu'il y a dans la Grande Comore ou Noa- zidya un volcan encore en pleine activité.
* Quelques commentateurs ont lu xawÿs Àcyouévns dupuyxos, ce qu'on appelle le nou- veau canal; celle version n'est pas générale- ment adoplée, parce que la phrase ne se lie plus avec celle qui précède.
° Lors même que nous n'aurions pas sur ce sujet les notions que nous ont lé- guées les anciens, il n'est pas possible d'ad- mettre que les navigateurs arabes n'aient pas visité, dès les temps les plus reculés, la pare de la côte orientale d'Afrique qui est comprise entre les tropiques; ces régions, dont l'accès est facilité par les vents réglés et périodiques qui y soufflent d'une ma- nière constante, leur offraient une foule de produits naturels qui devaient les y attirer. Au delà du tropique du Capricorne, au con- traire, le climat plus rude et le sol moins fertile w'avaent rien d'altrayant, et les vents, qui sont, ainsi que les courants, presque constamment contraires, ne leur permel- taient pas de s’aventurer plus au Sud.
® Geopraphi grœæci muinores (édilion de
Charles Muller), t. L, p. 267.
HISTOIRE DE LA GÉOGRAPHIE. 9
nuits pour arriver à l'ile Ménuthias, île basse et toute couverte d'arbres, dans laquelle il y a des fleuves, diverses espèces d'oiseaux et des tortues de terre. Les seuls animaux féroces sont les crocodiles, qui du reste ne font de mal à personne. Il y a des canots cousus et d’autres d’un seul morceau de bois” dont les habitants se servent pour aller à la pêche des tortues de mer, quils prennent aussi quelquefois d'une manière toute particulière avec des paniers placés le long du rivage à l'entrée des grottes sous-marines. »
Cette description s'applique parfaitement à l'ile de Madagascar et ne s'applique qu'à elle entre toutes celles qui existent le long de la côte d'Afrique. En effet, du côté de l'Ouest et du Nord-Ouest (jusqu'à la baie de NarendrŸ), l'ile de Madagascar apparait comme une terre basse, cou- verte d'arbres et d’arbrisseaux, coupée de nombreuses rivières; le cro- codile* est le seul animal féroce qu'on y trouve; les tortues de terre y sont de grande taille et abondantes”, et elles font encore aujourd'hui
1 Éote 08 êv aûrÿ mhoiipia parlàa nai uov6Ëuha, il y a dans cette ile des embar- calions cousues et d’un seul morceau. Ces deux adjectifs, qui, qualifiant le même sub- stanif, impliquent cependant des idées ab- solument contraires, m'avaient donné à pen- ser qu'Arrien avait peut-être désigné par celte périphrase ambiouë les pirogues à ba- lancier dont les habitants de la côte occi- dentale de Madagascar se servent de temps immémorial et qui sont composées, comme l'on sait, de deux parties distinctes, un canot très étroit, formé de planches attachées ou cousues à l'aide de fibres végétales (far16v), et un balancier ou grosse poutre (0»6ËvX0v) faisant contrepoids à ce,canot. Celte inter- prélation n'a pas élé admise par les hellé- nistes auxquels je l'ai soumise.
2 Nous ne pouvons pas, en effet, nous laisser arréter par la phrase obscure du commencement de la description, dont un des mots eirevndtwp n'a pu encore être in-
Histoire de la géographie.
terprélé jusqu'à ce jour, et où il est dit que cette île est située à 300 stades» (30 milles environ) de terre et vers le coucher du so- leil, au-dessus du vent de Sud-Ouest. Cette phrase, incompréhensible en tout état de cause, est en désaccord complet avec la des- cription de Ptolémée, et il y a là une erreur soit de rédaction, soit de copie; mais le reste de la description est exact de tout point.
5 Ce mot XpOXGdELROS, accompagné dans ce cas de l'épithète terrestre, a été quelque- fois employé pour désigner de simples lé- zards; mais et il est dit nettement « eroco- dile, animal féroce», ce qui ne permet pas de douter qu'il y avait à Ménuthias de vrais crocodiles, quoique, dans la phrase sui- vante, il soit dit qu'ils n'étaient pas dange- reux.
4 Il est évident que les auteurs anciens n'ont pas voulu parler de ces tortues grosses comme le poing, qui existent en tout pays
2
IMPKIMERIE NATIONALE,
10 MADAGASCAR.
l’objet d’un commerce important avec les îles de la Réunion et de Mau- rice, où on les recherche pour la table; en aucune autre partie des mers africaines, on ne pêche autant de tortues” et, en certains points de la côte septentrionale, cette pèche se fait encore au moyen de grands pa- niers. Enfin les canots en planches cousues avec des fibres végétales et les pirogues creusées dans un tronc d'arbre y ont été de tout temps en usage.
Cette descripüon, qui convient si bien à Madagascar, ne saurait au contraire s'appliquer n1 aux Comores, îles élevées et montagneuses, n1 à aucune des trois principales îles de la côte orientale d'Afrique”, Pemba, Zanzibar et Mafia, où 1l n'y a ni forêts, ni rivières”, ni grosses Lortues de terre, ni crocodiles, et, du reste, on n'eût pas cité, comme un fait extraordinaire, l'absence dans des îles aussi petites d'animaux féroces
autres que les crocodiles.
et ne sont d'aucune utilité; 1l ne peut non plus être question des tortues colossales d'Aldabra, puisque dans cette île, qui est toute petite, il n’y a ni rivières ni croco- diles.
1 La pêche des tortues de mer est le sport favori des Sakalavä; sur la côte ocei- dentale de Madagascar, il n'y a pas de pe- lit village où l’on ne voie au bord de la mer des autels, formés de branches d’ar- bres, auxquels sont accrochés, comme au- tant de trophées, les plastrons des tortues que leurs habitants ont prises.
? Aucune de ces petites iles, qui sont si- tuées tout près de la terre ferme, n'aurait pu être considérée comme formant la limite méridionale de la mer Prasodes (océan In- dien); or Marcien d'Héraclée indique nette- ment que Ménuthias marque la limite Sud de cette mer. Je doute fort, du reste, qu’elles aient attiré à celte époque reculée l’atten- üon des navigateurs; il n'y a que peu de temps en effet qu'elles ont pris de limpor-
tance. Les boutres arabes, qui atterrissent facilement dans toutes les rades et anses de la terre ferme, n'avaient pas besoin de rechercher, comme nos grands navires euro- péens, l'abri de ces îles, faute de ports où ils pussent jeter l'ancre en toute sûreté, et tout le commerce était alors concentré dans les villes de la côte; il serait étonnant que, lorsque des points importants par leur popu- lation et leurs richesses n’élaient pas men- lionnés, on eût parlé de ces iles de pelite étendue, à peu près inhabitées et sans com- merce.
$ Les petits ruisseaux de Moéra, de Mtoni, de Bet el-Ras, de Bouboubou, de Kikaan- goni, de Madyi-mekoundou, de Mzingoué- mzimpooué et de Kipanga, qui arrosent Zanzi- bar, ne peuvent avoir été dénommés &orTapor. Au reste, les îles situées au long de la côte orientale d'Afrique sont trop plates et trop petites pour avoir de vraies rivières; il ressort du texte, qui dit terres basses et fleuves, que l'ile Ménuthias a une étendue considérable.
HISTOIRE DE LA GÉOGRAPHIE. 11
De tous les détails que nous trouvons dans les auteurs anciens au sujet de Ménuthias, ainsi que du temps nécessaire pour y aller par mer et de sa proximité d'îles volcaniques, 1l semble ressortir que cette île est Ma- dagascar.
Il MOYEN ÂGE.
1° GÉOGRAPHES ET VOYAGEURS ARABES.
La configuration que tous les géographes du moyen âge ont donnée aux côles de l'Afrique montre quon a ignoré Jusqu'au xvi° siècle la vraie disposition des mers et des pays de l'Orient '. Cependant les Arabes ont rassemblé sur ces contrées des notions plus complètes et plus exactes que les anciens. Les Grecs et les Romains n'ont en effet bien connu et décrit en détail que les provinces de leur propre empire: chez les Arabes au contraire, qui, poussés par le fanatisme, entreprirent après la mort de Mahomet la conquête religieuse de l'Asie et de l'Afrique, la géo- graphie prit un grand essor, et, toutes confuses que sont les descriptions qu'ils nous ont laissées des divers pays où ils ont prêché les doctrines de leur prophète, elles témoignent d'un progrès réel.
Néanmoins, malgré les relations commerciales que leurs compa- triotes ont entretenues, de temps immémorial, avec la côte orientale de l'Afrique *, les géographes arabes ont, jusqu'au x° siècle, relié ce conti- nent à l'Asie et fait communiquer le Nil avec l'ndus. En 947, Ma-
! Au moyen àge, on voyageait peu. Plu- ? Un siècle et demi environ ayant Jésus- sieurs docteurs musulmans ont proposé de Christ, les Arabes vendaient aux Grecs des priver de ses droits civils tout individu qui denrées qu'ils leur donnaient comme pro- s'embarquerait sur mer, car ils n'admettaient venant du Yémen, mais qu'en réalité ils point qu'un homme sensé püt se risquer allaient chercher dans l'Inde et en Afrique. sur un navire, ne partageant point l'avis Ptolémée, dans sa Géographie, dit que du prophète juif qui, au contraire, disait : les marchands de l'Arabie heureuse tra- lceux voyent les œuvres de Dieu qui s’en vont fiquaient sur la côte de Afrique jusqu'à
sur la mer dedans vaisseaux ! Rhaptum.
12 MADAGASCAR.
coudi”, dans son livre le Moroudj addhahab (Les Prairies d'or), donne quelques détails intéressants sur cette côte; 11 parle d’un canal ou «bras de mer» connu des marins d'Omän? et de Siräf (Tcharak) sous le nom de Berberi* ou plutôt de mer des pays de Berbera et de Djafouna (&,3=)", canal de 500 milles de long sur 100 mulles de large”, au fond duquel sont silués, à la suite du pays des Zend}, le Sofala et le Wakwak°, et où se trouve, entre autres iles, à une distance d’une à deux journées de navi- sation du continent, l'ile de Kanbalou ?. Beaucoup de savants ont pensé que Kanbalou était Madagascar *; si cependant on fait attention que cette ile, d'après la description même de Macçoudi qui en parle avec connais- sance de cause puisqu'il l'a visitée en 916”, est placée au mulieu du canal de Berbert, qu'elle était habitée par des Zend] et qu'elle a été conquise
! Abou Zeyd Hassan, qui à écriten 851 la relation des voyages du marchand Soléi- män dans la mer des Indes, ne parle pas des pays situés au Sud de Socotora (Reinaud, Relation des voyages arabes au 1x° siècle).
? Les Arabes qui fréquentaient ces pa- rages à cette époque venaient de l'Oman et appartenaient à la tribu des Azd; ils étaient de la secte ibadyte ou chiite et reconnais- saient lautlorité d'un Mehdi de la famille d'Al (Barbier de Meynard). r Lorsqu'ils vo- guent en pleine mer, montant et descen- dant au pré des flots écumeux, ils chantent le refrain suivant :
Berbera et Djafouna, que vos vagues sont folles!
Djafouna et Berbera, vos vagues sont terribles!»
5 Ce canal est cité dès le ix° siècle par Albateni (Reinaud, /ntroduction à la Géo- graphie d'Abou’l Féda, p. cerxaxv) : + L'océan Indien, qui mesure 8,000 milles sur 2,700, donne naissance sur les côtes de l'Afrique, auprès du pays de Berbera, à un canal nommé Berberi, dont la longueur est de boo milles et la largeur de 100.»
1 Macoudi, Les Prairies d'or, t. 1, cb. x (texte et traduction par C. Barbier de Mey- nard et Pavet de Courteaille, 1861, p. 232).
® D'après Maçoudi, ce canal, où les vagues sont hautes comme des montagnes, est très dangereux. La pleine mer, qu'il fallait af- fronter pour aller à l'ile Kanbalou, causait une frayeur bien naturelle à des marins qui étaient habitués à suivre les côtes el à relàcher dès que le temps devenait mauvais.
5 Le pays de Sofala était la limite extrème que les Arabes atteignaient à celte époque dans leurs voyages sur la côte Afrique. Quant au pays des Wakwak, il semble pro- bable que c’est l'archipel asiatique.
5 Suivant les manuscrits, Hx (Fan- balou), is (Canilou) ou fks5 (Kanba- lou); c'est celte dernière orthographe qui est le plus généralement adoptée. Dans la géographie d’Aboul Féda, on lit Qonbolah.
S C'est l'avis de Reinaud, de Dulaurier, de Malte-Brun et de Gevrey (Essai sur les Comores). Voir aussi les Notices et extraits des manuscrits de la bibliothèque du Roi, 1. (1787).
9 Voir Maçoudi, t. 1, ch. x, p. 233.
HISTOIRE DE LA GÉOGRAPHIE. 13
vers 82/4 par des Azd, musulmans de la secte chiite ou plutôt 1badyte, que ces Azd ont adopté la langue zend} et que le rot appartenait à leur caste!, enfin qu'il y avait des cocotiers, il ne semble pas possible que l'auteur ait désigné sous ce nom la grande ile de Madagascar, qui est au moins à deux jours de navigation de la côte d'Afrique, qui n'a Jamais eu de rois musulmans”, où l'on ne parle ni le soahili, ni le koa, mi aucune des langues zend}, et où le cocotier a été introduit récemment et est encore aujourd'hui assez rare. Kanbalou est certainement l’une des Comores, peut-être Anjouan * qui est, depuis longtemps, habité par des \rabes, et Madagascar est le pays de Djafouna" qui, avec celui de Ber- bera”, forme le canal de Berberi ou de Mozambique”.
Au même siècle, deux autres géographes, AT Istakhri et Ibn Haou- qal, ont dressé des planisphères montrant la terre avec ses continents et ses mers, telle qu'on la concevait alors; mais sil n'est pas facile de déterminer quelle peut être l'ile qu'ils ont figurée dans la mer des Indes sous le nom d'Aoual, au-dessus du pays d'Habaschah (Afrique orientale), 1l n'est pas douteux que ce n'est pas Madagascar; ils disent en effet qu'ils ne se sont pas occupés des pays des Zend] où noirs d'Afrique,
1 Voir Macoudi, t. [, ch. 1x, p. 205. Behaim sur la côte Nord-Est de son ile,
— Les Comoriens sont encore aujourd'hui purement imaginaire cependant, de Mada-
chütes, et leur langue lient du soahili et gascar, vienne de ce nom arabe Djafouna.
du koa, avec un certain nombre de mots malgaches.
? [y a depuis très longtemps, en deux ou trois ports de la côte Nord-Ouest, des chefs musulmans, des cadis qui exercent la juridiction sur leurs coreligionnaires établis dans ces ports, mais ils ont loujours été soumis à l'autorité des rois du pays.
5 Reinaud, Guillain et Yule pensent que Kanbalou est la Grande Comore, mais Ma- coudi ne parle pas du volcan qu'il n'aurait cerlainement pas passé sous silence. Pour M. Van der Lith, Kanbalou est Zanzibar!
[n’est pas impossible que le nom de Davona, nom de la ville placée par Martin
® [ne faut pas confondre ce pays de Ber- bera ou Mozambique avec celui des Berbers situé dans l'Tfriqiya (Afrique septentrionale ).
5 Au xr° siècle, AT Biroûni cite épalement le canal de Berberi parmi ceux qui, avec le Colzoum ou mer Rouge et le Farès ou golfe Persique, découpent le continent situé à l'Ouest de locéan Indien. Aucun naviga- teur, dit-il, n'a dépassé Sofala dans le pays des Zend}, parce que la mer communique au Sud-Ouest avec l'océan Atlantique à tra- vers des canaux étroits (canal de Mozam- bique) où les vagues s’entrechoquent, met- tant les navires en pièces (Reinaud, /ntrod. à la Géopraphie d'Abou’l Féda, p. 14 et 15).
14 MADAGASCAR.
parce que «ces Zend] n'ont rien de ce qui constitue un état, ni lois, ni religion, n1 gouvernement régulier»; leurs cartes ne montrent aucune ile entre le Zanguebar et l'Inde.
Ï faut arriver au grand ouvrage d'Édrici, le Nozhet al-moschtak, pour trouver quelques détails plus précis sur les îles de la côte orientale d'Afrique. Ce géographe, qui, comme l'on sait, vécut longtemps en Si- cile à la cour du roi Roger et réunit à la demande de ce prince toutes les notions qu'on avait alors sur les diverses contrées de la terre, a com- posé un grand planisphère qui fut gravé sur une table d'argent et dont on trouve la copie dans Fun des manuscrits de notre Bibliothèque natio- nale”. Le tracé et l'orientation des côtes même les mieux connues y sont très défectueux, ce qui ne peut pas nous étonner, puisque leurs courbes et sinuosités continuelles troublaient forcément les calculs de gens qui navigualent sans boussole et sans astrolabe. Cependant, parmi les nom- breuses iles qu'il indique dans l'océan Indien, il y à un groupe qui re- présente certainement l'archipel des Comores et auquel 11 donne le nom d'êles Zanedy (£5,)*. Macoudi s'était déjà servi de ce nom, qu'il éerit Zabedy, pour désigner Java, et, après Édrici, cette dénomination ne s'est plus guere appliquée qu'aux iles de l'Extrême-Orient. I est facile de com- prendre comment Édrici a été amené à confondre sous le même nom des iles aussi éloignées que celles des Indes, d’une part, et Madagascar et les Comores, d'autre part, ou plutôt à les considérer comme faisant partie
! Voir le manuscrit n° 892 du Supplé- ment du fonds arabe de la Bibliothèque na- tionale.
> Ce nom, qui sienifie îles des Cocos, n’a pas la même orthographe dans les divers manuscrits du Nozhet al-moschtalk qui sont parvenus jusqu'à nous. Il est écrit tantôt Zaledj où Raledj, tantôt Zabedj, où bien Ranah, Raneh, Ranep. Cette diversité de transcriptions vient de ce que, dans l’écri- ture courante des Arabes, les voyelles sont supprimées, et que, par conséquent, un même mot se prononce différemment sui-
vant la manière dont on les supplée; en outre, le même caractère, suivant que les points diacritiques qui l'accompagnent sont mis soit au-dessus, soit au-dessous, ou bien manquent, répond à des lettres différentes, et les copistes omeltent souvent ces points ou les disposent d’une façon si confuse qu'on a peine à les reconnaitre. Dans les textes ordinaires, le sens général de la phrase suffit pour guider le lecteur; il n'en est plus de même lorsqu'il y a des noms propres qui donnent forcément lieu à des interpré- talions fort diverses.
HISTOIRE DE LA GÉOGRAPHIE. 15 d'un même archipel; imbu des idées préconisées par Ptolémée, il a, sur son planisphère d'argent, prolongé le continent africain vers l'Est jusqu'aux confins de l'Océanie, de sorte qu'il fait de la mer des Indes LA e LA ® A 9 une vaste Méditerranée: sur la mappemonde qui